Le Barbitiste à bouclier Polysarcus scutatus dans les Alpes-Maritimes en 2023, identification et prédateurs

Le Barbitiste à bouclier Polysarcus scutatus dans les Alpes-Maritimes en 2023, identification et prédateurs

Article complet:
https://drive.google.com/file/d/158ZBySUTpOSt23TFmUb5RW7IIrFHS0r-/view?usp=sharing

Mots-clés : Polysarcus scutatus, Barbitiste à bouclier, identification, prédateurs, vulnérabilité, biodiversité, inventaire de la faune, Alpes-Maritimes
Auteur : Eliot STEIN-DEFFARGES
Citation : STEIN-DEFFARGES E. - Le Barbitiste à bouclier Polysarcus scutatus dans les Alpes-Maritimes en 2023, identification et prédateurs. 10 pages.

Photographies couverture : Mâle juvénile de Barbitiste à bouclier à Valderoure © Joss DEFFARGES et cerques d’un mâle adulte à Péone© Eliot STEIN-DEFFARGES

Photographie n°1 : Plaine de Caille lors d’une prospection avec le CEN PACA le 30 avril 2016 © Monique MARTINE 

Introduction
Le Barbitiste à bouclier est une espèce qui ne semble plus subsister qu’en France en 2023, avec deux petits noyaux de population dans les Pyrénées et le Massif central, et des populations déconnectées mais plus nombreuses dans les Alpes. Nous avons donc une lourde responsabilité sur la sauvegarde de ce joyau patrimonial, qui alimente entre autres les Faucons crécerellettes et kobez dans leur migration printanière, et assure une grande quantité de protéines pour le succès reproducteur de nombreux membres de la faune qui ont la chance d’avoir cet orthoptère à portée de bec, de griffe ou de crochet à venin. Le fait que cette espèce soit protégée est loin d’être suffisant pour lui épargner des désagréments (golf de montagne, station de ski, luge d’été, activités touristiques diverses, circulation routière, surpâturage, gestion des prairies de fauche…). Les biotopes qu’elle fréquente sont infiniment précieux, abritant toujours une biodiversité exceptionnelle et souvent que partiellement préservée, avec des taxons endémiques, rares et menacés, Râle des genêts, richesses floristiques, entomologiques ou malacologiques, etc.… ce qui devrait faire penser que le Barbitiste à bouclier est une « espèce bouclier » pour des écosystèmes fragiles. Rarement réellement pris en compte dans les études d’impact ou les plans de gestion et avec des stations toujours très localisées du fait que l’espèce est aptère, c’est le Barbitiste à bouclier qui est peut-être la manne la plus vulnérable de ces sites.

Carte n°1 : Répartition mondiale du Barbitiste à bouclier Polysarcus scutatus, les dernières populations sont uniquement françaises selon le Global Biodiversity Information Facility (=Système mondial d'information sur la biodiversité) 

Dans la dernière publication sur l’espèce d’octobre 2015 de Roger MAILLOT, « Éléments sur la distribution de l’orthoptère Polysarcus scutatus (Brunner von Wattenwyl, 1882) et sur des phénomènes de prolifération constatés dans les Hautes-Alpes en 2011 et 2013 », il est évoqué l’une des caractéristiques les plus intéressantes de ce taxon, sa capacité certaines années à se multiplier sur une localité au point d’envahir routes, bâtiments et toutes les prairies attenantes. La succession de ces évènements de prolifération semble aléatoire, aucun élément météorologique ne l’explique pour l’instant, et alors que de nombreuses femelles pondent sur un site une année, rien ne dit que l’année suivante l’espèce pourra être observée ! Ce mystère n’est toujours pas élucidé pour certaines autres espèces d’orthoptères, mais c’est souvent la pluviosité qui conditionne les émergences, dans le cas du Criquet pèlerin par exemple. Dans les Préalpes des Alpes-Maritimes, la prolifération a eu lieu en 2015, 2016, très forte en 2017, puis en 2021. Mais autour de Péone et Beuil, Saint-Dalmas-le-Selvage et Saint-Etienne-de-Tinée, les autres stations connues, le phénomène n’a jamais été constaté. Une sous-prospection de ces autres sites des Alpes-Maritimes peut être supposée, sans certitude. Retrouver ces stations d’altitude est toujours plus délicat que celle de plaine de moyenne altitude. Les conséquences de ces proliférations sont très bénéfiques pour la nature, une forte ressource disponible localement pour les prédateurs, mais aussi un engrais naturel avec les excréments, puis la mort des adultes après la période de reproduction. On estime l’apport en nutriment pour les Poacées en montagne à 30% uniquement grâce aux orthoptères selon une étude publiée dans « Le Courrier de la Nature ». Les bergers et les agriculteurs qui font du fourrage ont tout intérêt à laisser se produire ces phénomènes.

Photographie n°2 : Mâle adulte de Barbitiste à bouclier à Caille traversant la route lors d’une prolifération © Joss DEFFARGES  

Identification
L’espèce étant rarement rencontrée, les éléments permettant de l’identifier sont souvent méconnus et elle est régulièrement confondue avec Polysarcus denticauda, le Barbitiste ventru, dont la répartition est large en France et recoupe justement quelques stations de Polysarcus scutatus. Les deux espèces peuvent avoir des morphes de coloration extrêmement variable, et seuls les critères anatomiques permettent une détermination fiable (même si dans les Alpes-Maritimes, les variations de Polysarcus denticauda semblent nettement moins fantaisistes qu’ailleurs dans le monde, en Grèce par exemple). L’identification par le chant est conseillée, car les stridulations peuvent être discriminées assez facilement avec un peu d’expérience, ou avec le matériel technique adéquat, et évite la galère de la capture dans les hautes herbes.
Le plus souvent parapatriques, les mâles sont assez facilement identifiables :
Polysarcus denticauda n’a pas de fastigium du vertex rétréci, le bord du pronotum est souvent plus irrégulier et largement jauni dans sa partie postérieure, avec une plaque sous-génitale dépassant nettement des cerques qui paraissent très fins.

Photographie n°3 : Mâle adulte de Barbitiste ventru, éléments d’identification en rouge © Joss DEFFARGES

Photographie n°4 : Mâle adulte de Barbitiste ventru, plaque sous-génitale dépassant nettement des cerques qui paraissent très fins © Joss DEFFARGES 

Polysarcus scutatus a le fastigium du vertex fortement rétréci, déjà visible sur les immatures, le bord du pronotum est assez régulier et blanchâtre ou verdâtre dans sa partie postérieure, avec une plaque sous-génitale dépassant à peine des cerques qui paraissent très épais, surtout à leur base.

Photographie n°5 : Mâles adultes de Barbitiste à bouclier, éléments d’identification en rouge © Joss DEFFARGES

Même mon petit frère à 4 ans est capable de les identifier.

Photographie n°6 : Mâle adulte de Barbitiste ventru Polysarcus denticauda dans le massif de l’Authion, on voit nettement la plaque sous-génitale dépassant les cerques © Eliot STEIN-DEFFARGES

Photographie n°7 : Mâle adulte de Barbitiste à bouclier Polysarcus scutatus dans les Préalpes, on voit nettement que la plaque sous-génitale ne dépasse pas les cerques © Eliot STEIN-DEFFARGES  

Les femelles sont bien plus difficiles à déterminer. Il existe des différences entre leurs plaques sous-génitales, mais sur le terrain, le critère s’avère difficile à apprécier sans élément de comparaison.
Les meilleurs critères pour une femelle Polysarcus scutatus sont :

  • une allure très ballonnée par rapport à Polysarcus denticauda,
  • le fastigium rétréci,
  • la ponctuation noire est bien visible sur les fémurs des pattes antérieures,
  • le bord postérieur du pronotum n’est pas clair ou jauni,
  • l’oviscapte est toujours fortement denté entre la valve dorsale et la valve ventrale chez l’adulte.

Photographie n°8 : Femelle de Barbitiste à bouclier, éléments d’identification en rouge © Joss DEFFARGES sur une photo d’Hubert POTTIAU

Photographie n°9 : Comparaison des emplacements des dents sur l’oviscapte d’une femelle de Polysarcus denticauda à gauche en main, qui a de faibles dents entre la valve dorsale et la valve ventrale, et sur l’oviscapte de Polysarcus scutatus au milieu en main, et à droite dans son biotope, avec de fortes dents entre la valve dorsale et la valve ventrale © Joss DEFFARGES 

Les juvéniles lors de leur émergence sont théoriquement impossibles à reconnaître, car les éléments d’identification ne sont pas encore apparents ; sauf si l’année précédente, les femelles de Barbitiste à bouclier ont pu être repérées lors de leur ponte et si le secteur n’abrite qu’une seule des deux espèces.

Photographie n°10 : Emergence de Polysarcus scutatus le 18 avril 2013 sur un site de ponte repéré par Guy GEORGE en 2012 à Valderoure © Joss DEFFARGES

Photographie n°11 : Polysarcus scutatus le 6 juin 2013 sur le site de l’émergence de la Photographie n°10 © Joss DEFFARGES

Photographie n°12 : Femelle juvénile de Polysarcus denticauda à droite le 20 juillet 2013 à Tende et mâle juvénile à gauche le 25 juin 2011 à Tende, seule espèce présente dans cette commune © Joss DEFFARGES 

Prédateurs
Ces milliers de juvéniles de Polysarcus qui sortent du sol en même temps d’avril à juin constitueront une ressource alimentaire fort appréciée par d’autres groupes faunistiques, Reptiles, Faucons et Passereaux. En effet, à moyenne altitude, l’émergence est singulièrement précoce pour Polysarcus scutatus par rapport à toutes les autres espèces d’orthoptères de même calibre. Par exemple à Caille, même la première Grande sauterelle Tettigonia viridissima n’est pas entendue avant le 20 juin chaque année, alors que les Barbitistes à bouclier étaient déjà adultes à la mi-mai en 2015. Les prédateurs connus sont principalement, le Moineau domestique pour nourrir ses poussins (Caille le 16 juin 2021, le 20 juin 2022 et le 19 juin 2023 par Joss DEFFARGES), la Grive draine (Péone le 19 juillet 2018 par Joss DEFFARGES), le Faucon crécerelle (Caille le 3 juillet 2016 par Yves et Margareth VERET et le 20 juin 2020 par Joss DEFFARGES), le Faucon kobez (La Rochette le 18 mai 2011 par Marc CORAIL), et très probablement le Faucon crécerellette (Patrick KERN). La liste semble loin d’être complète, et sont soupçonnés en particulier tous les passereaux nicheurs et les reptiles fréquentant les mêmes biotopes que le Barbitiste à bouclier.

Photographie n°13 : Faucons kobez et crécerellette parcourant les prairies des Préalpes et capturant et se nourrissant en vol d’orthoptères © Patrick KERN

Photographie n°14 : Séquence de mise à mort d’un Polysarcus scutatus par une femelle de Moineau domestique à Caille le 16 juin 2021© Joss DEFFARGES

Article complet:
https://drive.google.com/file/d/158ZBySUTpOSt23TFmUb5RW7IIrFHS0r-/view?usp=sharing

Publicado el diciembre 20, 2023 05:58 TARDE por eliot13 eliot13

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